Par Claire Struelens. Initialement publié dans le trimestriel n°74, 2001.
Devenir un citoyen responsable qui se positionne et agit dans un esprit solidaire et critique nécessite des apprentissages.
Dans ce contexte, les activités de coopération permettent d’une part d’entrer en relation avec l’autre, les autres, dans un climat de confiance et de respect mutuel et, d’autre part, l’émergence d’aptitudes et d’attitudes qui favorisent, entre autres, la confiance en soi et mutuelle, le dialogue, la communication.
Dès l’enfance, la comparaison et son cortège d’inquiétudes et de compétition animent nos comportements. Comme chaque individu a besoin d’être reconnu et d’appartenir à un groupe, il cherchera à satisfaire ces besoins au travers des regards positifs ou négatifs au risque de s’affubler d’étiquettes qui le poursuivront tout le long de son parcours.
Développer l’estime de soi, découvrir des activités où personne ne sera exclu, favorisent petit à petit l’éclosion d’un autre regard et la perspective d’un changement relationnel.
Un élève de cinquième primaire dans une classe de 25 élèves nous dit après une activité intitulée «Carte des qualités». «Eh bien, j’étais décidé à changer d’école l’année prochaine car je croyais ne pas avoir d’amis ! Maintenant, j’ai envie de rester.»
Pour expérimenter et apprendre l’esprit de coopération et d’entraide, il est nécessaire de passer par différentes étapes qui se succèdent selon un ordre progressif.
Au nombre de sept, ces étapes s’intitulent :
- « Être accueilli », se sentir bien, en sécurité dans le groupe
- « S’exprimer »
- « Reconnaître ses qualités » et celles de l’autre
- « Prendre sa place » et reconnaître celle de l’autre
- « Écouter », mettre à profit tous mes sens, apprendre à écouter l’autre pleinement
- « Développer la confiance » en soi, en l’autre
- « Coopérer », construire ensemble
Selon le niveau de sécurité émotionnel du groupe, une étape peut prendre plusieurs heures, jours. En effet, si je ne me sens pas en sécurité avec mes compagnes et compagnons, il me sera difficile de m’exprimer et d’écouter.
En tant que formateur, animateur, éducateur… il est nécessaire de voir et de sentir l’opportunité du changement d’étape et d’activités.
le fait d’installer la coopération dans un groupe peut également se décliner sous forme d’objectifs :
- renforcer ou rétablir une image positive de soi essentielle pour avoir confiance en soi et oser faire des choix constructifs ;
- développer la capacité de s’exprimer personnellement dans le respect de l’autre ;
- développer la communication et l’échange à l’intérieur du groupe ;
- améliorer la capacité de réaliser une tâche en groupe en insistant sur l’implication de chacun ;
- susciter l’entraide comme moyen d’atteindre un objectif commun.
L’enfant, l’adolescent aura appris par la mise en situation qu’il existe d’autres attitudes, comportements, solutions dans l’approche relationnelle et pourra dès lors ouvrir un éventail de choix d’actions possibles en cas de nécessité. Les relations interpersonnelles et à terme les relations sociales peuvent se modifier.
L’essence de la démarche proposée par l’Université de Paix en vue d’apprendre à vivre avec nos différences c’est-à-dire gérer le conflit comme un enjeu commun et l’aborder comme une étape dans l’évolution de notre relation aux autres inclut donc les activités et jeux de coopération dans l’espace. Il s’agit d’un réel apprentissage. En effet, lors d’animations, je peux constater combien l’approche compétitive (gagnant/perdant) prévaut alors qu’elle n’est nullement annoncée dans l’énoncé de l’activité. Par exemple, lors du « Bingo » : plusieurs enfants se dépêchent de récolter le nombre de signatures demandé afin d’être le(s) premier(s) à crier «Bingo» ou encore, dépasser le nombre de signatures demandé pour être celui qui en a récolté le plus… L’apprentissage d’une logique collaborative est donc bel et bien un enjeu important en lien avec la gestion de conflits !