Du 2 au 5 avril 2002, l’Université de Paix a proposé un stage pour les enfants sur le thème de l’Afrique. Découverte d’une autre culture, d’un autre continent, mais également de soi et des autres… Durant ces quatre jours, nous souhaitions développer la confiance en soi, la coopération, l’ouverture aux autres et les attitudes nécessaires à la gestion positive des conflits. Tout un programme !
Un article initialement publié dans le trimestriel n°79 de l’Université de Paix.
Le soleil, ce matin, est au rendez-vous. Nous, les animatrices (Aurélie, Claire, Julie et Lysiane), attendons les enfants de pied ferme dans le domaine boisé de La Marlagne qui prend, pour quelques jours, les couleurs chaudes de l’Afrique. A leur arrivée, les enfants découvrent les huttes, les djembés et la girafe qui plantent le décor de cette aventure.
Et surprise ! Les enfants reçoivent leur billet d’avion pour Ouagadougou. Intrigués, ils s’asseyent sur les rangées de chaises disposées à la façon d’un avion. L’embarquement provoque quelques inquiétudes. «Tu crois que ma maman pourra venir me chercher là-bas ce soir ?» demande Axel…
Autour du grand arbre du conseil, nous installons les chaises en cercle. Grâce aux jeux coopératifs, mis à la mode africaine, la glace se brise. «Toutes les mangues changent de place !». Les enfants désignés «mangues» se lèvent, courent, rient et foncent vers une chaise libre. Le rythme est donné.
Progressivement, la vie du groupe s’organise. Les règles de vie sont élaborées de concert avec les enfants pour que chacun vive le stage le mieux possible. «On ne fait pas mal aux autres !» «On joue avec tout le monde !». Les idées fusent. Tout est noté noir sur blanc et les enfants signent fièrement en bas de la feuille en s’engageant à respecter le règlement.
A l’extérieur, le soleil nous attend. C’est avec entrain et énergie que les enfants partent par petits groupes à la découverte du Sénégal, de la République Démocratique du Congo, de la Mauritanie… et font la connaissance de Joséphine Makalélé, une animatrice déguisée pour l’occasion. Par de petits jeux, ils obtiennent des fruits qui deviendront sous leurs doigts experts une énorme salade de fruits !
Durant la semaine, les enfants ont pu expérimenter des jeux de coopération intérieurs et extérieurs, des activités artistiques et sportives, des jeux de pistes et de camps dans la forêt.
Par les bricolages, les enfants ont découvert leurs différences ainsi que la richesse de côtoyer les copains. Lors de la construction d’un Awalé, jeu de société africain, j’entends Oriane s’écrier à l’égard de Rimbaud «Bêêk, tu mets tes doigts dans la colle» et en se tournant vers moi «Moi, j’aime pas ça !». Et puis, bien après, je la vois plonger les deux mains dans le seau de colle en me disant «C’est pas si terrible que ça pour finir !» d’un air malicieux…
Nous proposons certains rituels pour faciliter la vie du groupe. Durant les temps libres, les enfants jouent dehors ou disposent du local divisé en plusieurs coins d’activités : dessin, tapis de lecture avec différents contes africains et autres histoires, … «Koumbalié», un chant d’enfants africains, sonne le rassemblement.
Les repas ont occasionné des négociations à propos des charges. «Qui met la table aujourd’hui ?» «Est-ce que cela te va si je débarrasse le goûter et pas le dîner ?». Les enfants ont pu prendre certaines responsabilités. Quelle satisfaction de les voir s’organiser entre eux pour les tâches ménagères !
Le soir, le conseil permettait aux enfants de s’exprimer à propos de la journée. Ce moment privilégié était l’occasion de dire ce qu’ils avaient apprécié mais également les choses qui s’étaient moins bien passées. Marie-Eve veut, par exemple, connaître le nom des enfants qui veulent faire une pièce de théâtre durant les temps libres car certains enfants se sont désistés.
Certaines discussions ont permis de négocier, de modifier ou d’ajouter des règles de vie. Elles ont été trouvées avec les enfants en lien avec ce qu’ils vivaient au cours de la journée : on joue au bâton un contre un, avec le bout du bâton…Notre but n’était pas d’interdire les bâtons mais bien de trouver avec les enfants une façon de répondre à notre besoin de sécurité et à leur envie de croiser le fer. Négocier les règles avec les enfants permet une plus grande responsabilisation et la construction d’un cadre commun dans lequel chacun, adulte comme enfant, trouve la satisfaction de ses besoins.
Après chaque jour, les enfants qui le désiraient participaient au journal commun. «J’ai trouvé cette journée superbe. J’ai aussi aimé le grand jeu et le jeu avec le parachute. J’ai aussi aimé les activités avec les paquets d’œufs. J’aimais aussi quand tout le monde tripotait dans la colle. En gros j’ai tout aimé.» (écrit par Le Vrai). Nous avons rassemblé tous les dessins et les contributions des enfants dans un journal, distribué à tous après le stage.
Lors de ce stage, certaines scènes nous ont remplies de satisfaction. Quel bonheur de voir les enfants s’intégrer dans le groupe en rendant de petits services à table, ou d’entendre un enfant dire à sa maman, les yeux pétillants, à la fin de la journée «Je m’suis fait plein d’amis, m’man !».
Julien explique que ce stage était «différent» des autres stages. Tout d’abord, il ne s’est pas disputé avec les autres enfants. De plus, il trouvait chouette qu’on n’interdise pas de jouer avec les bâtons. «Ailleurs, quand un jeu se passe mal, on l’interdit. Ici, on a pu discuter et trouver des règles pour qu’on puisse encore jouer». Adrien , lui est reparti en chantonnant la musique qui rassemblait les enfants après la pause : Kombalié…
Un sourire jusqu’aux oreilles, les enfants sont repartis les bricolages pleins les mains et la tête remplie de souvenirs… Hakuna Matata !
Vivre ensemble dans un monde de respect, de tolérance et de coopération, c’est tellement plus chouette, n’est-ce pas, Joséphine Makalélé ?